Il y a un peu plus de dix ans, l’Assemblée mondiale de la Santé a décidé à l’unanimité que les soins palliatifs relevaient de la responsabilité éthique des différents systèmes de santé internationaux. Pourtant, aujourd’hui, tout le monde n’a pas nécessairement accès à des soins palliatifs adéquats. En effet, la Belgique est le seul pays où les soins palliatifs sont inscrits dans la loi, à savoir la Loi relative aux soins palliatifs de 2002.1 Afin d’attirer à nouveau l’attention sur l’importance des soins palliatifs, un groupe international de parties concernées a décrit dans la revue scientifique de premier plan, The Lancet, les mesures à prendre au cours de la prochaine décennie pour améliorer les soins palliatifs à l’échelle mondiale.2
Chaque année, plus de 73 millions de personnes à travers le monde endurent une forme ou une autre de souffrance grave liée à la maladie (« serious health-related suffering » ou SHS), pour laquelle elles peuvent avoir besoin de soins palliatifs.3 Et ce nombre devrait s’accroître de manière exponentielle dans les années à venir.4 Pourtant, seuls 12 % des adultes et 2 % des enfants souffrant de SHS reçoivent effectivement des soins palliatifs, et ce principalement dans les pays à revenu élevé.5 Bien que l’on attire régulièrement l’attention sur l’amélioration des soins palliatifs, la mise en œuvre de stratégies efficaces fait toujours défaut. C’est pourquoi un groupe d’auteurs a rédigé un commentaire sur la manière d’améliorer l’accès aux soins palliatifs dans les années à venir. Parmi les participants figuraient des personnes ayant elles-mêmes été gravement malades, des représentants d’organisations internationales et régionales de soins palliatifs et d’autres acteurs clés dans le domaine des soins palliatifs.
Pour commencer, les auteurs souhaitent que tous les ministères de la santé reconnaissent que les soins palliatifs sont essentiels et non facultatifs. À cette fin, ces ministères devraient adopter le « Essential Package of Palliative Care », rédigé par la Lancet Commission on Global Access to Palliative Care and Pain Relief (GAPCAR).6 Ces recommandations sont abordables et prennent en compte les différentes situations locales, rendant les soins palliatifs accessibles à tous, quel que soit l’âge ou l’état de santé. À cet égard, la responsabilité de fournir des soins palliatifs devrait être confiée à tous les professionnels de la santé qui s’occupent de personnes gravement malades. Donc non seulement aux médecins, mais aussi, par exemple, au personnel infirmier, aux travailleurs sociaux et aux pharmaciens. La mise en œuvre des soins palliatifs devrait être financée localement par les ministères, les soins palliatifs étant intégralement remboursés par l’assurance maladie.
Les auteurs estiment également que la formation aux soins palliatifs devrait être rendue obligatoire pour tous les professionnels de santé s’occupant de patients gravement malades. Idéalement, elle devrait être intégrée aux cours de base et aux cours de suivi. En formant mieux les professionnels de la santé aux soins palliatifs, il est possible de traiter les patients de manière holistique, en tenant compte du contexte familial et culturel dans lequel ils se trouvent. Une meilleure formation faciliterait également le déploiement et l’application des outils internationaux dans un contexte local.
Les soins palliatifs doivent être adaptés aux valeurs et aux expériences des communautés locales. La communauté d’une personne peut jouer un rôle essentiel dans la gestion d’une maladie mortelle, d’un décès ou d’un deuil. Ainsi, les soins optimaux varient d’une culture à l’autre et d’un endroit à l’autre. Par conséquent, les communautés locales devraient être invitées à jouer un rôle actif dans le développement et l’organisation des soins palliatifs. Pour impliquer durablement ces communautés dans les soins palliatifs, des campagnes internationales peuvent être lancées à l’intention, par exemple, des patients gravement malades, des institutions locales de soins (palliatifs), des organismes religieux et d’autres institutions socioculturelles. Impliquer ces parties permettrait de déstigmatiser les soins palliatifs et de donner aux populations les plus pauvres, en particulier, plus de pouvoir sur leur propre santé.
La recherche permet d’analyser les points sur lesquels la politique et la pratique sont en désaccord, et elle soutient la traduction des preuves scientifiques en stratégies et politiques nationales. Par exemple, la Commission GAPCAR demande que la qualité des soins soit mesurée non seulement en « espérance de vie corrigée du facteur d’incapacité » (Disability-Adjusted Life Years, DALY), mais aussi en « espérance de vie corrigée du facteur de souffrance » (Suffering-Adjusted Life Years, SALY). Cela inclut également la charge de la souffrance liée à une maladie grave ou à la mort dans les calculs utilisés pour effectuer des négociations concernant les coûts des soins de santé, par exemple. Le dernier point soulevé par les auteurs concerne le renforcement des partenariats entre les différents acteurs des soins palliatifs. Entre les spécialistes médicaux, les gouvernements et les ONG, par exemple.
Références